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Sœur Marie Blanche Hien, présidente de l’association « Se prendre en charge » : « Le Christ nous envoie où il est moins présent, vers les plus pauvres »

lundi 26 mai 2014

« Faa I Tuora » (se prendre en charge en Dagara) de Marie Mère de Dieu est une association féminine à but non lucratif. Fondée en 1998 sur initiative de Sœur Marie Blanche Hien, franciscaine missionnaire de Dieu, en réponse au cri de détresse des femmes rurales submergées par la misère, la structure a été reconnue par les autorités burkinabè, le 28 juin 2006. Dans cet entretien, la présidente de l’association qui n’est personne d’autre que Sœur Marie Blanche Hien, présente sa structure de même que ses ambitions pour les femmes du Sud-Ouest.

Sidwaya (S.) : Qui est Sœur Marie Blanche Hien ?

Sœur Marie Blanche Hien (M.B. H) : Je suis franciscaine, missionnaire de Marie. Je suis née le 12 avril 1965 à Dissin. J’ai fait mes premiers vœux, le 19 mars 1994 à Ouagadougou et le vœu perpétuel, le 13 juin 1999.

S. : Qu’est-ce qui vous a motivé à vous lancer dans cette œuvre ?

M.B.H : C’est ma conviction et mon attachement au Christ qui dit : « je suis venu pour qu’ils aient la vie et qu’ils l’aient en abondance » qui a été à la base de mon engagement. J’ai essayé de comprendre cet évangile dans le sens qu’avoir la vie n’est pas seulement la vie éternelle. Je pense qu’il faut d’abord goûter à la vie terrestre dans sa plénitude. J’ai trouvé que ces femmes sont dans une misère inacceptable ! Je voudrais donc partager avec elles cette conviction que la vie que le Christ promet est réelle et peut se vivre à travers un métier. Aussi, dans ma congrégation, il est écrit dans notre constitution que le Christ nous envoie où il est moins présent, vers les plus pauvres. Nous avons une congrégation qui a pour objectif de se donner totalement pour soulager la misère des autres à travers le Christ. Mon engagement provient également de ma famille. J’ai suivi un peu mon papa qui était une personne ouverte pour les plus pauvres. Je pense que cet héritage du papa m’a aidée dans l’initiation de l’association. J’ai aussi été encouragée par ma mère.

S. : Quels types d’activités votre association mène ?

M.B.H : Comme activités, nous avons l’élevage des porcs et des poules, la couture, la teinture, le tissage et la restauration. Dans les villages, nous avons une banque de céréales. L’autre grand projet que nous avons, c’est ce que nous appelons « une femme, un vélo ». Nous nous battons pour que les femmes aient au moins un moyen de déplacement qui leur permette d’aller un peu plus loin avec leur commerce. Sachant que dans le milieu, les gens se déplacent surtout à pied, nous avons commencé par le vélo. De nos jours, plusieurs femmes ont réussi à avoir leurs vélos.

S. : A combien peut-on estimer le nombre d’adhérentes de votre association ?

M.B.H : Nous avons 3191 adhérentes. Toute femme peut y adhérer. Mais il y a des conditions. Avant d’adhérer à l’association, il faut d’abord que la femme ait entre 18 et 60 ans. Nous avons une préparation de six mois avant d’intégrer définitivement la femme dans la structure. Cette préparation a deux phases. On explique à la nouvelle adhérente quelques stratégies de l’auto-prise en charge, à savoir le commerce, comment être avec les autres tout en acceptant que les autres soient différentes de soi, etc. Celles qui sont chrétiennes (catholiques) sont formées à travers la récitation du chapelet. Mais l’association reste ouverte à toutes les femmes, quelle que soit leur confession religieuse. Nous avons beaucoup de femmes musulmanes venues d’autres parties du Burkina comme membres. Le fait de ne pas être chrétienne ne constitue donc pas un obstacle à l’adhésion à notre association.

S. : D’où proviennent les ressources de votre association ?

M.B.H : Nos ressources proviennent d’abord des femmes elles-mêmes, qui cotisent. Elles font des cotisations annuelles de 1000 FCFA chacune, pour mener certaines activités. Nous avons aussi le soutien des bienfaiteurs. Nos ressources proviennent également des activités génératrices de revenus que nous menons. Tout cela ne suffit pas au regard du nombre de femmes et connaissant un peu la misère dans nos milieux, c’est comme des gouttes d’eau dans la mer. Néanmoins, nous faisons avec en espérant que nous aurons le soutien des uns et des autres pour pouvoir sortir les femmes de la région du Sud-Ouest de la misère.

S. : Faut-il croire que votre association ne connaît pas de difficultés ?

M.B.H : Les angoisses ne manquent pas ! La difficulté majeure, c’est surtout le manque de financements. Les femmes sont très nombreuses et nous avons fait une programmation d’activités dont nous n’avons pas, pour le moment, de moyens de satisfaire. L’autre blocage, ce sont les hommes qui refusent que leurs épouses évoluent. C’est vrai que ce ne sont pas tous les hommes, mais il y a des résistances tout de même. Par exemple, il y a des époux qui ne sont pas disposés à voir leurs épouses aller à vélo alors qu’eux-mêmes n’en possèdent pas. Il y a aussi des époux qui, bien que possédant des vélos, sont mécontents, car celui de leur épouse est neuf. C’est comme si l’épouse est devenue supérieure à son époux ou qu’ils sont pareils. Nous avons constaté qu’il y a des hommes qui ont un peu de difficultés à accepter la donne. Mais au fil du temps, les mentalités ont changé. On a l’impression que de nos jours, des époux sollicitent qu’on accueille leurs épouses.

S. : En tant que présidente de l’association « Faa I Tuora » de Marie Mère de Dieu, qu’est-ce qui vous tient à cœur ?

M.B.H : J’appelle les franciscains à prier pour nous. Je pense que la première des choses, c’est la prière. C’est Dieu qui fait le développement, ce n’est pas nous. Ensuite, je voudrais faire observer que nous sommes ouvertes aux idées et aux soutiens de toutes natures. Un de nos objectifs prioritaires, c’est d’arriver à diminuer la faim dans notre zone d’intervention. Pour le moment, c’est dans la zone du Sud-Ouest que nous agissons, mais les femmes ne sont pas toutes de la localité. Il y a de nombreuses femmes qui résident à Ouagadougou, et qui sont membres de l’association. Je voudrais remercier grandement notre nouveau parrain, en la personne de M. Stanislas Médah qui est en train d’accompagner nos activités. Je n’oublie pas de remercier Monseigneur Der Raphaël qui nous soutient énormément. Bien sûr, j’ai une pensée pour mes sœurs franciscaines qui ne dorment pas car elles nous soutiennent financièrement et par leurs prières. Je voudrais les remercier toutes.

S. : Quelles sont vos ambitions pour l’avenir ?

M.B.H. : Nous projetons construire un centre de formation pour les femmes, quatre (4) magasins de stockage, de transformation et de commercialisation des produits locaux. Nous envisageons également la mise en place d’une unité de séchage de fruits et légumes (mangues, papayes, tomates, épices), la dotation des groupes de solidarité et d’entraide en charrues à traction asine et bovine pour améliorer les rendements agricoles, la mise en place d’une unité de fabrication du beurre de karité et la contribution à l’amélioration des conditions de l’habitat (construction de deux chambres-salons pour chaque femme). Pour finir, je dirai que l’association « FaaITuora de Marie Mère de Dieu » est une expérience qui est à ses débuts. Elle a besoin du soutien des personnes et des organismes d’aide au développement. Reconnaissante pour tout ce qu’elle a déjà reçu, elle lance encore un pressant appel à tout partenaire au développement qui voudrait bien l’aider à faire de ses rêves une réalité afin que s’améliore la condition de la femme dans le Sud-Ouest, au Burkina Faso, en Afrique et dans le monde. Toute contribution sera donc la bienvenue et rencontrera sans aucun doute la reconnaissance des nombreuses femmes de « Faa I Tuora » qui regardent l’avenir avec confiance.

Ali TRAORE (traore_ali2005@yahoo.fr)

Sidwaya

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